- aveuglette (à l')
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⇒AVEUGLETTE (À L'), loc. adv.Fam. À la manière d'un aveugle, à tâtons, sans y voir clair. Aller, avancer, marcher à l'aveuglette :• 1. Elle [Germinie] ressentait de divines douceurs, quand la petite (...) promenait sur tout son visage le chatouillement et le tourment de ces chères petites menottes qui semblent chercher à l'aveuglette la face d'une mère...E. et G. DE GONCOURT, Germinie Lacerteux, 1864, p. 114.• 2. Je fus saisi par les ténèbres. Leur épaisseur était si dense que j'avançais à l'aveuglette, lentement, de crainte de heurter contre un arbre.BOSCO, Le Mas Théotime, 1945, p. 63.Rem. A remplacé l'expr. vieillie en aveugle (DUB.).— Au fig. En agissant au hasard, sans réfléchir, sans avoir les éléments d'information nécessaires :• 3. Ainsi nous allons à l'aveuglette dans un monde de ténèbres. Cette infirmité me rend sceptique quant à la gravité de certaines de nos erreurs.GREEN, Journal, 1940, p. 49.• 4. Bien sûr, nous partons sans informations, sans repères, à l'aveuglette.A. ARNOUX, Les Crimes innocents, 1952, p. 290.PRONONC. :[(al)
].
ÉTYMOL. ET HIST. — 1457 loc. adv. a veuglettes « en aveugle » (Arch. JJ 189, f° 61 v° ds GDF., s.v. veuglettes : Apres qu'il luy eust fait voye il s'en sault sans riens dire et en soy devalant a veuglettes et sans clarté) forme déglutinée jusqu'au début XVIIe s. Charron ds HUG.; XVe s. aveuglectes (L'Amant rendu cordelier, 754 ds DG : D'aller ainsy aveuglectes, L'on chiet); 1611 à aveuglettes « id. » (COTGR.); 1694 adv. aveuglette (Ac. : Aller aveuglette. Chercher quelque chose aveuglette. Il est bas); 1762 loc. adv. mod. (Ac. : Aveuglette, à l'aveuglette. Façon de parler adverbiale. À tâtons. On disoit autrefois, A aveuglette; mais l'usage a depuis ajouté l'article; et on dit, Aller à l'aveuglette. Chercher quelque chose à l'aveuglette. Il est familier).Réduction prob. de la loc. adv. a aveuglette(s), elle-même formée, à partir de aveugle, p. anal. avec la loc. à mucette « en cachette », dimin. de muce « cachette » (attestée de 1418 à la fin du XVe s. ds GDF. s.v. mucette). O. BLOCH, Notes étymol. et lex. ds R. Ling. rom., t. 11, pp. 316-318; l'introduction tardive de l'art. est sans doute destinée à éviter le hiatus après la prép. et à conformer l'expr. aux loc. de manière du type à l'anglaise, etc. (cf. à la (bonne) franquette, expr. du XVIIe s. qui s'est toujours employée avec l'article).STAT. — Fréq. abs. littér. :45.BBG. — BLOCH (O.). Notes étymol. et lex. R. Ling. rom. 1935, t. 11, pp. 316-318.aveuglette (à l') [alavœglɛt] loc. adv.ÉTYM. 1762; loc. adv. a veuglettes, 1457; adv, aveuglectes, XVe; de aveugle.❖1 Sans y voir clair. ⇒ Aveugle (en). || Chercher quelque chose à l'aveuglette. ⇒ Tâtons (à). || Il ouvrit la porte à l'aveuglette.1 Et tâtant à l'aveuglette, Ramuntcho trouve en effet ce tronc d'arbre, mouillé, glissant et rond.Loti, Ramuntcho, II, 9.1.1 Combat d'un lézard et d'un serpent d'un mètre de long, noir lamé de blanc, très mince et agile, mais si occupé par la lutte que nous pouvons l'observer de très près. Le lézard se débat, parvient à échapper, mais abandonnant sa queue, qui continue longtemps de frétiller à l'aveuglette.Gide, Voyage au Congo, in Souvenirs, Pl., p. 687.1.2 Il arrive aussitôt devant l'escalier, en face du soldat, qui, pour éviter la rencontre des deux corps dans le noir, tend les mains à l'aveuglette autour de lui, à la recherche d'un mur contre lequel il pourrait s'effacer.A. Robbe-Grillet, Dans le labyrinthe, p. 60.2 Fig. Au hasard, sans prendre de précautions. ⇒ Aveuglément. || Se lancer à l'aveuglette dans une aventure. || Agir à l'aveuglette.2 (…) lesquels votent, pour la plupart, tu sais comment : à l'aveuglette, sous la pression de racontars de bistros !Martin du Gard, les Thibault, VII, 61.
Encyclopédie Universelle. 2012.